La moustache de Plekszy-Gladz
Hergé
a imaginé avant-guerre deux États d'Europe centrale : la
Syldavie et la Bordurie. Le premier vit sous une monarchie
constitutionnelle et apparaît ensuite dans le camp occidental
durant la guerre froide. Le second représente dans le Sceptre d'Ottokar les
dictatures d'extrême-droite comme le montre le nom de son
dirigeant Müsstler composé de Mussolini et d'Hitler.
Le salut bordure « amaïh ! » provient du marrollien,
mais il imite le Heil hitlérien. L'opposition entre les deux
pays revient dans le diptyque consacré à la lune, la
Bordurie appartient alors au camp de l'Est. Cependant, Tintin n'a fait
qu'un bref passage en Bordurie jusqu'alors. Dans l'Affaire Tournesol, paru en 1954-1956, Hergé décrit le régime policier de ce pays.
Le nouveau chef du pays, le maréchal Plekszy-Gladz, porte
un nom en rapport avec le sujet de l'album : le professeur Tournesol a
inventé un appareil à ultrasons qui détruit le
verre. Pleksy-Gladz est d'abord représenté par ses
moustaches, l'exclamation « par les moustaches de Plekszy-Gladz
» est la phrase bordure par excellence. Le culte de la
personnalité atteint un tel degré chez les Bordures que les bacchantes du dictateur se retrouvent partout : ainsi les voit-on sur le drapeau national, les calendriers, les luminaires, les poignées de portes, les calandres ou les pare-chocs des automobiles... Plus fort encore : la langue bordure elle-même est moustachue,
comme en témoigne la forme particulière de l'accent
circonflexe que l'on retrouve dans le nom de la ville Szohôd.
Cependant, l'Affaire Tournesol, p. 46, première vignette de la quatrième
bande, présente un nom avec un vrai accent circonflexe sur les
capitales grasses lorsque l'avion atterrit à Szohôd. On
peut supposer que c'est une forme plus internationale. En revanche, le
nom de l'hôtel Sznôrr ou Zsnôrr p. 47 et 50 montre
deux orthographes selon l'entrée principale et l'entrée
de service, Hergé rectifiera ce détail plus tard. On remarquera aussi que le mot « hôtel »
ne reçoit pas d'accent circonflexe car le nom est bordure, non
français. La moustache de Plekszy-Gladz elle, est bien visible
et elle ne peut être confondue avec un accent circonflexe.
L'accent
bordure revient sur les mots en o comme l'expression sztôpp p. 47 et tzhôl p. 59 !
Est-ce à dire que seule cette voyelle serait diacritée ?
Comment la prononcer ? En tout cas, elle n'intervient pas dans le nom
du colonel Sponsz.
Il semble que l'orthographe bordure soit assez capricieuse : on dit Szprinkoth, Szohôd, Plekszy-Gladz, priszty, Himmerszeck, sztôpp, Sponsz, Laszlo, mais on écrit Zsnôrr, zserviz...