Le français utilise l'alphabet dit latin.
Les lettres sont classées dans l'alphabet :
– En voyelles parce qu'elles sont censées
représenter des phonèmes vocaliques : a, e, i, o, u, y. Mais
le y est aussi une semi-consonne ou une semi-voyelle yod en phonétique
(yacht) tout comme le i devant une autre voyelle(iole) ; le u peut représenter
la semi-consonne ué (huile). Le digramme ou peut aussi être
la semi-consonne wé devant une voyelle (ouate), le digramme oi ou
oe pour une semi-consonne suivie d'une voyelle (poële, poil). Le y peut
encore servir pour une semi-consonne et une voyelle (ployer).
Les voyelles graphiques ne sont donc pas toujours des voyelles
phonétiques ou des phonèmes vocaliques. D'ailleurs,
certaines voyelles entrent en fait dans la composition de
phonèmes consonantiques parce que ce sont des lettres
diacritiques. C'est notamment le cas de e et de u après c, g : geai, guerre, cueille.
– En consonnes qui sont censées représenter
des phonèmes consonantiques : b, c, d, f, g, h, j, k, l, m, n, p, q,
r, s, t, v, w, x, z. Le h n'est pas prononcé en français, il
donne lieu parfois à une disjonction, mais c'est surtout une lettre diacritique. Le q n'est pratiquement jamais seul, il est suivi presque toujours de u sauf en finale (coq, cinq) et dans des mots d'origine arabe où il note un qaf opposé à kaf. Le w peut être la consonne
v, la semi-consonne ué, la semi-consonne wé. Le x peut noter
une consonne s (Bruxelles), ou deux : gz (examen). Quelques autres consonnes ont aussi une valeur double lorsqu'elles entrent dans des mots d'origine étrangère : Giro, jeep, paella, pizza, cañon.
On ne traitera donc ici que de la division scolaire
traditionnelle entre lettres consonnes et lettres voyelles.
1) Féminin ou masculin ?
Les noms de voyelles sont autonymiques et autoréférentiels,
ils sont tous masculins. Les noms de consonnes connaissent deux usages. Un
a, un e, un i, un o, un u, un i grec.
a) Les noms toujours masculins
Ces noms sont ceux des consonnes dont le nom commence par une consonne :
b, c, d, g, j, k, q, t, v. Cet usage existe depuis le Moyen Âge. On
y ajoute les consonnes à nom complexe : w, y, z. Puis les lettres
grecques : alpha, bêta... digamma... wau... Enfin les noms des
lettres hébraïques utilisées en phonétique : chwa, yod. C'est le cas de toutes les autres lettres hébraïques
en français. En cyrillique des noms complexes sont employés comme en grec, en hébreu bouki pour bé, par exemple.
Ce sont ceux des consonnes qui commencent par une voyelle lors de
l'épellation : f, h, l, m, n, r, s. Un cas particulier,
« x », le plus souvent masculin, mais qui a
été utilisé au féminin durant le XIXe s. Ces usages peuvent sembler affectés, mais j'aime bien ce côté
désuet. L'Académie et Littré donnent le genre féminin pour
ces consonnes.Pourquoi est-on passé à la généralisation du
masculin dans l'usage courant ? À cause d'une épellation nouvelle et sans
grand succès durant le XIXe s. et jusqu'à la moitié du siècle suivant, on a dit : be, ce, de, fe... le, me, ne... re, se... et même kse. Cette prononciation est dite moderne car elle provient de Port-Royal, au XVIIe
s. L'autre prononciation, plus ancienne, est médiévale,
mais elle a été révisée par Ramus à
la Renaissance et on verra que cela ne lui a pas porté chance...
Je note aussi
cette épellation croustillante dans les écoles
catholiques du Québec :
on disait « que » pour la lettre impudique ou
sale (« ka »
était néanmoins resté). De même, en France,
le « q » a été aussi renommé en
« qué » dans les écoles bien-pensantes...
Certains témoignages laissent penser que deux lettres ont pu
être oubliées dans les alphabets scolaires encore au
début du XXe s., mais non partout : le k suspect de germanitude, le w qui n'entre vraiment dans les dictionnaires qu'au cours du XIXe s. même s'il entrait dans beaucoup de noms du Nord et de l'Est de la France.
Revenons-en au q. Sa prononciation est due à Ramus qui reprochait les confusions entre ké (c), ké (k) et ké (q). Il a donc révisé le système et a imposé les formes cé, ka comme kappa, qu pour rappeler le rôle de la lettre en latin ou l'orthographe en français, puis esse afin d'éviter la confusion avec c. Malheureusement, le nom de la lettre q sonnait comme une grossièreté et on le lui a dit avec violence. Ramus mourra la nuit de la Saint-Barthélémy assassiné par un grammairien catholique... Nous devons aussi à Ramus le nom des lettres dites ramistes. Le latin et l'ancien français ne faisaient pas de différence entre i (capitale, lettre interne) et j ou i long (minuscule comme lettre initiale, parfois en finale), entre u (minuscule, lettre interne et finale) et v (capitale, lettre initiale). Ramus n'invente pas ces lettres, elles existaient avant lui et c'est Sylvius qui le premier leur attribue une fonction référentielle différente et non plus contextuelle. Toutefois, c'est Ramus qui nomme ces lettres i, ji pour rappeler l'origine en i, i grec et non pas ipsilon comme en italien ou upsilon comme en grec, u et vé.
c) Les noms issus de lettres
C'est un peu au K par K... On pouvait écrire les lettres sous un nom complet, il en est resté des noms de choses : une esse
ou crochet, un ixe ou tabouret, un té. Pour « esse »,
le genre est en train de changer. Ainsi votre « h » était-il aussi
une « hache ». Effe, elle, emme, enne, erre, esse sont des mots qui ont pu s'écrire et qui s'écrivent encore, mais ils semblent surranés.
2) Disjonction ou non ?
Normalement, on ne doit pas faire de disjonction sauf devant les
lettres voyelles. Mais l'élision peut se comprendre pour des
raisons honorables, surtout à l'oral, et en particulier pour les
voyelles. Il faudrait écrire « l'h »,
« l's », « l'x ». Et
allez-vous faire comprendre à l'oral si vous dites
« lâche »,
« laisse »... cela se répercute à
l'écrit. De la même manière, les lettres grecques
ou les noms hébraïques déjà cités ne
devraient pas être précédé d'un article
élidé : l'oméga, l'alpha, l'epsilon. Or cela
peut ne pas être toujours clair pour l'auditeur, et on a tendance
à dire : le iota, le yod (la présence d'une
semi-consonne aide). Il s'agit d'éviter une
ambiguïté. On a donc aussi
des disjonctions pour des raisons expressives dans des cas de citation,
un peu comme pour les numéraux lorsqu'ils sont indiqués
comme tels. Que l'on dise « le h » ou « la
h » ne me choque pas puisque l'on a affaire à la
même construction expressive que pour « le
hiatus » (la prétendue aspiration est mieux
représentée).
Le masculin est en
fait apparu dans la série f, h, l, m, n, r, s par la disjonction
et par l'imitation du modèle des voyelles : le x copie
l'usage du i et non de l'i. Mais que l'on se penche sur les
lettres employées comme noms propres : un polytechnicien est de
l'X et non du X ou de la X. Ou que l'on revoie la devinette dans
Arsène Lupin...