Le
f provient du
f
latin, du digamma grec qui notait une spirante, Ϝ. La lettre note une
fricative labiodentale sourde. Elle s'oppose à v qui note la
consonne sonore correspondante. En liaison,
f sera prononcé
v.
Le digamma est une création grecque. La lettre n'apparaît pas dans
l'alphabet phénicien. Elle a été obtenue en ajoutant une barre au
gamma Γ, d'où le nom de gamma double. Le grec ancien a peu
utilisé cette lettre qui est tombée assez vite à l'initiale ou qui a
été notée par un phi Φ. Cette dernière lettre se prononçait d'ailleurs
non plus comme un /p/ aspiré, mais comme un /f/ à l'époque de la
colonisation romaine. Elle a gardé cette valeur.
Le français est une des rares langues avec l'anglais à avoir conservé
la transcription latine du phi par le digramme ph. La plupart des
autres langues européennes emploient le f.
L'étrusque a employé la lettre digamma, mais aussi un carré ouvert à
droite et une sorte de 8. Le digamma ne se rencontre ailleurs que dans
l'alphabet messapien et l'alphabet de Novilara. Le f apparaît en latin
archaïque sur la fibule de Préneste avec la forme à redoublement
FheFhaked (
fecit, il a fait).
Le f conserve sa barre dans l'écriture cursive romane et médiévale car cette lettre pourrait être confondue avec le
s long ſ . C'est aussi l'une des rares lettres à ne pas recevoir de diacritiques modifiant sa prononciation.
Le f est un phonème stable du latin au français. Toutefois, de nombreux
finals sont issu de b (bove, bœuf ; clave, clef ; nervu, nerf ; servu,
serf), ou de p (capu, chef). La consonne s'assimile à la marque du
pluriel en ancien français, d'où les doubles prononciations (œuf, œufs
; mais aussi avant le XIXe s. cerf, cerfs) ou les doubles orthographes
(clé, clef). Ou bien encore elle ne se prononçait pas devant consonne
(mille neu'-cents). Il n'y a guère que dans foris que le phonème a été
affaibli : hors, dehors, horsain. Toutefois, cela n'atteint pas le
niveau de l'espagnol pour lequel les f latins sont devenus des h
: hijo (de filius, « fils »). On soupçonne une influence basque à
ce propos car le même phénomène s'y observe. Les mots castillans
comprenant un f sont des emprunts faits après l'époque romane, ou bien
des termes d'origine régionale.