L'homophobie dans les mots
Cette page ne porte que sur l'homosexualité masculine.
1. Les dérivés de pédéraste
Le pédéraste était dans la Grèce antique
celui qui s'occupait de l'éducation d'un jeune homme. Le terme a
pris en français le sens d'homophile et il a donné lieu
à des variantes multiples, surtout en français
contemporain.
– Pédé, pède (1836), ped (1980) par apocope.
– Pédéro (1881), pédoc (1957), pédoque
(1919), pédo (1980). La terminaison -oque (mastoc) est
motivée par un jeu de mots avec la Rôtisserie de la reine
Pédauque, roman d'Anatole France. Or le mot reine est un des
noms donnés aux homosexuels. La forme pédéro est
sans doute un écho à vénéro pour
vénérien par ellipse de maladie vénérienne.
– La forme pédoque constitue une des motivations du nom du
phoque à partir de pédé comme un phoque (1980) par
dissémination de la rime. La locution repose sur des jeux de
mots multiples : d'une part il y a un rappel du verbe anglais to fuck
« forniquer », d'autre part le foc est la voile
triangulaire qui rappelle le triangle rose et qui prend le vent
arrière avec métaphore de la sodomie. Enfin, la
transformation du foc en phoque est peut-être dû à
une allusion aux homosexuels moustachus.
– Pédale désigne à la fois l'homosexuel (une
pédale) et l'homosexualité (être de la
pédale). La métonymie (1935) provient sans doute d'une
comparaison avec le coureur cycliste qui courbe les reins sur les
pédales. Le mot est verlanisé en français des
années 80 : dallepé sur un modèle 2-3-1.
Être homosexuel se dit pédaler – La verlanisation de
ped en dep (1979) a obtenu un succès grâce au film de Guy
Hockenghem Race d'ep, avec fausse coupe de la préposition ou
déglutination. Cela aboutit aux formes synthétiques
rasdep et razdep.
2. En quelque chose
Les métaphores de la sodomie s'expriment principalement par des verbes qui fournissent ensuite des substantifs.
a) L'action
– Enculé. Le verbe apparaît en 1734, le nom pour
l'homosexuel passif en 1860, mais enculeur pour l'homosexuel actif
dès 1790. Enculage, enculade, enculerie ne se rapportent pas
forcément à la sodomie, mais aussi à la tromperie.
– Enfiotté
b) L'instrument
–Emmanché
– Empaffé
– Empapaouté
– Enviandé
c) La destination
– Empétardé
– Emprosé
– Encaldossé
d) Le résultat
– Enfoiré
3. Des peuples antiphysiques
L'homophobie se double souvent de la xénophobie.
– Aller se faire voir chez les Grecs signifie aller se faire sodomiser
selon les mœurs attribuées aux Grecs de l'Antiquité.
– Des mœurs italiennes ou florentines, le vice italien, ces expressions
classiques remontent à la Renaissance avec l'arrivée de
nombreux italiens sous la Renaissance. Attention ! le mal italien ou
napolitain se réfère à la syphilis ramenée
par les troupes françaises après leurs expéditions.
– Les hérétiques cathares étaient supposés
sodomites. Il en reste l'expression bougre pour désigner un
homosexuel, le Bougre était le nom donné au Bulgare et la
secte des Bogomiles était composée en partie de Bulgares.
Le terme était fort explicite à l'époque
classique, mais il a été fortement démotivé
dans les expressions un bon bougre, un brave bougre, bougre d'idiot. Le
terme était devenu affectueux par antiphrase, l'hypocoristique
devenait aussi un marqueur comme espèce de. Les mots
enculé et enfoiré sont devenus de la même
manière des hypocorismes notamment sous l'influence de Coluche.
– La peuplade imaginaire des Papaouts a fourni empapaouté.
4. Que des bêtes
Une constante de la haine, c'est le refus de l'humanité. Dans le
cas de l'homosexualité, cela se double souvent d'une
féminisation pour dénier la virilité. On peut
aussi voir une obsession de la prostitution.
– Biche : l'emploi provient à la fois du terme biche pour
désigner des femmes séduisantes à partir du Parc
aux cerfs cher à Louis XV et puis de l'emploi antérieur
de bique.
– Bique : la bique provient de l'expression bique et bouc (1867) pour
désigner l'homosexuel à la fois actif (bouc) et passif
(bique). Le sens est fortement péjoratif et dévalorisant
du fait des connotations attribuées à la bique, animal
stupide, pour les pauvres, s'exprimant par des cris absurdes. En
revanche, le bouc est le mâle hétérosexuel qui est
pourvu d'une forte virilité.
– Castor : le terme provient de l'argot des matelots (1920). Le castor
travaille avec sa queue, donc sa verge, et le mot désigne les
prostitués homosexuels.
– Crevette : le mot s'est d'abord appliqué aux
prostituées femmes (1864), nom popularisé par la
Môme Crevette de Feydeau (1899) qui représentait une
cocotte. Le terme ne s'applique aux jeunes prostitués qu'en 1983
par une sorte de retour à un argot désuet comme cela est
fréquent.
– Libellule : le mot s'est d'abord appliqué aux femmes. Il est contemporain.
– Pédé comme un loup de Poméranie : le loup,
c'est le loupiau ou petit garçon . Le loup est aussi une
abréviation du nom du loulou, petit chien ridicule ou bien
loubard donc voyou.
– Phoque : le phoque a été expliqué en 2.
– Zèbre : le zèbre est d'abord un individu douteux (1889)
par analogie entre la robe de l'animal et puis la très ancienne
représentation des rayures comme marque diabolique (les Juifs
ont dû porter des habits rayés comme les
prostituées au Moyen Âge bien avant les forçats).
Le mot s'applique aux homosexuels à partir du livre de Bory la
Peau des zèbres (1969). Une surmotivation par zeb, zob ou
pénis n'est pas à exclure.
5. Tous les copains
On part de copain. Le mot est resuffixé en copaille (1883) avec
le suffixe péjoratif -aille de bleusaille, mouscaille,
poiscaille, flicaille. Ce mot déjà synonyme d'homosexuel
devient lopaille (1887) en largonji, lopaillekem par louchébem
(1887).Le mot donne lope (1889) par apocope, lopette avec suffixe
féminin, lopesse (1883), lopard (1953) avec suffixe
négatif. La lopette change de sens aussi, c'est le lâche
ou le dénonciateur (1899). Le radical fournit loper (1899),
« sodomiser ».
6. Si chou !
– Faire, marcher chou pour chou (1928), c'est se livrer à des parties homosexuelles.
– La chochotte (1901), c'est la personne qui fait des chichis, donc qui
est maniérée, que ce soit une femme ou un homosexuel.
– L'hypocoristique chou et son féminin choute se trouvent appliqués aux homosexuels par dérision.
– Chou donne la terminaison de michou à partir de miché
(d'où micheton, michette, michetonneur) client d'une
prostituée, dupe et du personnage de Michel, ivrogne, bon
à rien. L'analogie avec les miches ou fesses a dû jouer.
– Chouquette est un vocatif affectueux qui est tourné en dérision.
7. C'est nous les gars de la marine !
– La jeune fille qui ondule de la croupe est comparée à
un navire (1844), d'où la féminisation
méprisante pour les homosexuels (1836).
– Le jeune homosexuel à la taille fine devient une
frégate avec féminisation dévalorisante (1821),
puis un frégaton (1904) avec un diminutif.
8. Des jeux de boules
L'analogie entre les testicules et les boules donne les noms
boulère ou bouleur, pointeur ou homosexuel actif (1978) surtout
en milieu carcéral, pétanqueur (1977) avec jeu de mots
sur le pétard. Le bilboquet désigne la copulation entre
le mâle et la femelle par analogie de l'emboîtement, jouer
au bilboquet merdeux (1975) ou être un bilboquet (1860), c'est
être homoexuel.
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caroline cuir danseuse efiotte folle
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tante tantouze tarlouze tapette tasseuse tat tonton travelo
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être de la jaquette brioche infernale la maison
tire-bouchon