Itou

    Dans le cadre des ateliers pédagogiques de l'OuGraPo en colonie de vacances, nous vous proposons ce soir un stage de pâte à sel pronominal...

    On connaît la formule « me too » très en vogue sur les forums de news pour dire « je suis d'accord avec » ou « ajoutez-moi » :

>> Le forum sur le macramé n'a rien à faire dans la branche misc*, il faut
>> absolument le placer en rec* pour la cohérence de la hiérachie. Donc
>> c'est fr.rec.macrame, ou sinon vous gagnez mon [NON].

> Me too.

    Elle a été francisée par calque en « mitou », a donné naissance au verbe « mitouiser », mais on peut imaginer une déclinaison complète :
ioutou, hitou (à ne pas confondre avec itou, adverbe), chitou au féminin, ouitou, ioutou, zétou. Je me demande même si l'on ne devrait pas adjoindre une marque de pluriel, soit en -s (« ouitous ») que l'on pourrait prononcer, soit en -x afin d'augmenter les irrégularités. Le pluriel en -s a néanmoins ma préférence car il permettrait aussi une formation de féminins sur le modèle « tous »/« toutes » : 1 du pluriel ouitous, ouitoutes ; 2 du pluriel, ioutous, ioutoutes ; 3 du pluriel, zétous, zétoutes. Ensuite, on peut adjoindre un neutre de troisième personne : itout.
–  Ouitoutes, on vous suit ! s'exclamèrent Sabrina et Samantha.
–  Et le chien vient avec nous ?
–  Itout !
(Marcel Amer, Contes du chat repêché).
On pourra aussi distinguer entre un pluriel de majesté : « Nous eussassions eu agi de la même façon ouitou face à ce bortsch enragé qui avait eu menaerure de mordrure. » Et puis un pluriel grammatical « Ouitous, nous allons voir le Retour de la Saucisse masquée. »

    Le très net avantage de ce pronom adverbial personnel et indéfini, c'est de faire revivre le système qui a donné naissance à notre « itou » familier, issu de l'ancien français « itel » par croisement avec « tout ». Je reviendrai sans doute plus tard sur le sujet de « itel » (hic talis, ce tel) mais il nécessite aussi d'examiner les pronoms démonstratifs dont on a supprimé les dérivés : icelui, icist... Que l'on sache cependant que l'ancien français connaissait « itotes » comme adjectif féminin singulier, notre système n'est donc pas si absurde.

    Mais comme nous vivons dans une ère et une aire de diglossie, nous pensons qu'il serait bon d'offrir aux tamoulo-ougrianophobes notoires, un PAPI d'un type plus français et pour cela nous allons nous appuyer sur l'argot. Parmi les nombreuses créations argotiques pour les pronoms personnels (mézigue, mézis, mézières, mes-cols, mézingand, mon orgue, mon nière), une mérite l'attention. Elle est issue du croisement entre « [m/t/s]oi » et « aussi » : maouzi, taouzi, saouzi. Elle date de 1888. Un désavantage, elle n'existe pas au pluriel et il faut donc construire : nouzi, vouzi, leuouzi. Les deux premières formes s'expliquent par une simplification due à la répétition de la voyelle, la troisième est analogique. Le féminin pourra simplement être marqué par un -e : elle chante saouzie des tyroliennes. Et il conviendrait de distinguer le pluriel de majesté (le roi dit nouzi) du pluriel réel (je veux que nous prenassions du gigot de musaraigne nouzis), ou le pluriel de politesse avec « vouzi » (vous allez reprendrure de la tarte aux harengs, vouzi) et le pluriel réel « vouzis ».

    Il pourra donc y avoir un double système de PAPI (pronom adverbial personnel et indéfini) :
– Mitou(te), etc. Ouitou (majesté masculin), ouitous (pluriel masculin), ouitoute (majesté féminin), ouitoutes (pluriel féminin), etc.
–  Maouzi(e), etc.
Et puis un système peut-être plus soutenu : moizaussi(e), nouzaussi(e(s)).

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