Cueillir l'orgueil
En ancien français, les diphtongues que nous écrivons
aujourd'hui « eu », « œu » et que nous
prononçons /œ/ ouvert ou /ø/ fermé étaient
souvent notées « ue ». Cette graphie correspondait
à la diphtongaison de ŏ bref tonique en latin. Ainsi bŏve(m) donne buef, puis bœuf, cŏrde(m) donne cuer, puis cœur, mŏla donne muele, puis meule. Le fait se produit aussi
pour ŏ suivi d'un l palatal ou mouillé : fŏlia > fueille > feuille, sŏliu > sueil > seuil, dolus > dueil > deuil.
La graphie « eu » pour les phonèmes /œ/ et /ø/
était utilisée pour noter la diphtongaison de ō long et
de ŭ bref latins. Ainsi flōre donne flour puis fleur. Cette graphie a
été généralisée à partir du
XVIIe s. pour l'ensemble des anciennes diphtongues.
Toutefois, dans un certain nombre de mots, on a
préféré employer aussi un « o »
étymologique afin de rapprocher un terme de ses parents savants
: œuf et ovaire, œuvre et opérer, voire ouvrage, mœurs et
morale, bœuf et bovin, nœud et nodal. Dans le cas de cœur, le « o » joue en
revanche un rôle à la fois étymologique, analogique
et diacritique : il empêche la prononciation /s/.
Il n'en va pas de même pour un petit nombre de termes qui ont
conservé plus ou moins leur graphie d'ancien
français. Le « u » est resté à
la même place après « c » ou « g »
pour des raisons diacritiques . Cela concerne :
– Cueillir et ses
dérivés, cueillette,
cueilleur, cueilleuse, cueilloir, cueillaison.
– Accueil : accueillir,
accueillant(e).
– Recueil : recueillir, recueillement.
– Écueil, mot sans
rapport avec les précédents, du latin scopulus
– Cercueil,
déformation populaire du grec sarkhophagos,
« sarcophage ».
– Bouscueil : mot
québécois du verbe bousculer
pour le mouvement des glaces.
– Orgueil : orgueilleux,
orgueilleuse, orgueilleusement, (s') enorgueillir. Ce dernier
mot est d'origine francique et non latine.
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