Vouloir
Le verbe vouloir disparaît en portugais et espagnol, il sera remplacé
par quaero (chercher). De même en Sardaigne. Il sert à former le futur
en roumain sous l'influence du grec et parfois en rhéto-romanche sous
l'influence de l'allemand. Ces deux aspects seront traités séparément.
Pour le sens du futur, c'est
ici. Le radical de vouloir présente moins de disparate que celui d'aller ou d'être, mais son histoire n'est pas moins complexe.
1. Le présent
latin
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italien
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occitan
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ancien
français
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français
moderne
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volo
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voglio
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vuelh
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vueil
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veux
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vis
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vuoi
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vols
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veus
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veux
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vult (volt)
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vuole
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vol
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veut
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veut
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volumus
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vogliamo
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volèm
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volons
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voulons
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vultis (voltis)
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vogliete
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voletz
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volez
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voulez
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volunt
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vogliono
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volon
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vuelent
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veulent
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– Le premier élément de la triphtongue /ueu/ ne se
dissimile pas, mais il disparaît après f, v, k, g (cf. cueillir, par
exemple). Les personnes 2 et 3 sont donc veux, veut. Toutefois, les
formes plus normanno-picardes vieus, vieut et viaus, viaut ont existé
aussi (cf. yeux, viau, biau, fieu).
– La première personne est refaite sur la deuxième, comme bien souvent,
donc veil avec conservation de la consonne préservée par la finale. La
graphie en -x rappellera ensuite l'origine avec l, comme c'est
l'habitude (caballus > chevals> chevaux). Elle s'étendra par
analogie à peux qui ne possède pas ce l d'origine (possum, refait en
poteo).
– La première personne présentait une palatalisation du l encore
présente en italien et occitan. Elle a été supprimée par la réfection.
– L'alternance vocalique en français est l'aboutissement de
l'accentuation latine : les personnes 4 et 5 avaient un radical atone,
il ne diphtongue pas. En occitan, 2 et 3 avaient un radical à voyelle
entravée qui ne pouvait diphtonguer.
– Le passage de voloir et volons à vouloir et volons illustre en
français classique la querelle des ouïstes et des non-ouïstes. Le o à
l'initiale passe à ou dans un grand nombre de mots (par exemple dans
l'opposition moustier et monastère), pouvoir et vouloir subissent un
sort identique par analogie.
Le subjonctif
– Latin : velim
– Ancien français : vueille
– Occitan : vuelham
– Italien : voglia
Toutes les formes néo-latines ne peuvent pas remonter au latin
classique, mais à une réfection du subjonctif en -am à partir de
l'infinitif velle refait en *vollere. Le radical de l'infinitif roman
emprunte sa base au présent, la désinence d'infinitif -e- est prise
comme une partie du radical, et on ajoute à ce verbe qui se termine
désormais en -e, une forme de subjonctif propre aux verbes comme deleo,
deleam.
La forme en français n'avait pas de diphtongaison en 4 et 5 :
voilliens, voilliez. Le i de transition provient de la palatalisation
de l comme en italien et occitan. La conjugaison a été refaite sur les
personnes fortes.
C'est ainsi que l'on a l'un des rares impératifs issus de subjonctifs.
Le fait est à remarquer puisque ce verbe n'avait justement pas
d'impératif en latin !
L'imparfait
Il a été formé comme les autres imparfaits sur les personnes fortes du
présent, mais le latin volebam permettait cette formation sans
changement de radical.