La disjonction dans les mots latins et grecs
commençant par h



En premier lieu, il n'existe pas de véritable h aspiré en français, sauf particularisme local ou diction théâtrale. Le h est purement graphique et se traduit par :
— la liaison avec le mot précédent, l'élision de l'article détermine le h dit muet ;
— l'absence de liaison, l'absence d'élision pour le h dit aspiré.
Grevisse parle de disjonction à propos de ce phénomène qui touche aussi des mots commençant par une voyelle graphique.
Il existait encore un véritable h consonne à la Renaissance, il s'est conservé en Normandie, en Wallonie ou en Lorraine, mais même le terme d'aspiration est incorrect pour décrire ce phonème.

Les mots d'origine latine qui ne se soumettent pas à la règle générale de non-disjonction sont peu nombreux.

Huit, huitain, huitaine : le h n'est pas étymologique, le mot vient de octo et ne devait pas être confondu avec vit à l'écrit. Le détachement a des valeurs expressives, il sert sans doute à rendre reconnaissable le mot. Mais on ne trouve pas la disjonction dans dix-huit ou dans six-huit.

Huis, huissier, huisserie et huis-clos : seul le huis-clos est sans élision, ni liaison, mais non l'huis. Le h n'est pas là non plus étymologique (ostium), il fallait distinguer le mot de vis, verbe mais surtout nom. Là encore, le détachement permet une meilleure compréhension de l'énoncé, mais la locution est surtout figée et se réfère à un usage formalisé de la langue. Les Wallons font néanmoins la disjonction pour les différents mots de la même famille. Notons que les autres mots avec un h faussement étymologique ne sont pas concernés : huître et huile.

Haut et ses dérivés ou composés (hauteur) : le h n'est pas étymologique (altus), mais ce mot a été confondu avec un mot francique. Marguerite de Navarre pouvait néanmoins compter six syllabes dans Ô admirable hautesse (Comédie de la Nativité).

Herse, herser, hérisser, hérisson : ces mots latins ont pu être confondus avec des mots germaniques par leur forme et par leurs significations proches de celles des mots germaniques. Il a pu y avoir aussi une valeur affective, un renforcement du sens par la prononciation. Bernard Palissy écrivait pourtant coquilles d'hérissons.

Hyène est un mot qui est souvent prononcé avec h dit aspiré malgré le bon usage. On peut penser à une attraction de haine et une connotation donnée par la prononciation. Loti écrivait que « l'hyène est un animal sensiblement moins féroce que la hyène ». Guère sérieux.

Hernie, hernié, hernieux, herniaire, herniotomie : même flottement dans la prononciation. Les usuels recommandent la disjonction, mais l'usage hésite. Le h semble emphatique et analogique de hargne.

Héros, héroïne, héroïque : seul héros est prononcé avec une disjonction pour éviter la confusion avec les zéros au pluriel. Il y a peut-être une raison supplémentaire : on s'est mis à expirer fortement les h des mots et des noms antiques à la Renaissance comme dans le nom d'Hector. Cette prononciation emphatique a été fortement condamnée par Ménage, mais il a pu en rester cette trace.On évoque aussi une attraction du héraut germanique.

Halo, hanap, harpie : on a sans doute affaire à un h expressif plus que logique. Les termes peuvent apparaître dans un discours soutenu, de genre noble.

Hululer, hululement : la disjonction est expressive pour un mot onomatopéique, elle évite aussi une cacaphonie lululement.

— La hiérarchie subit une prononciation ancienne avec consonne. Chifflet et Bouhours remarquent qu'on prononce de leur temps jérarchie. Ainsi, « Les escuyers en une chambre premiere, les chevaliers après en une autre chambre seconde et les grans chambelans les plus prochains qui entroient en sa chambre : c'estoient les trois gerarcies. » (Chastel) Cela s'étend à d'autres mots formés sur le même élément signifiant sacré : hiérarchique, hiératique, hiératisme

— Ces termes ont influencé l'hiéroglyphe, normalement sans disjonction, mais souvent malmené pour des raisons d'emphase. Par exemple, chez Chateaubriand « Une statue de bronze.... dont la base soit chargée de hiéroglyphes  ».

— De la même manière, l'hiatus devient souvent le hiatus pour mieux exprimer ce qu'est un hiatus dans la prononciation. 


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