D'autres mots sont empruntés au tupi-guarani : acajou et cajou, cobaye, couguar, ipéca, jaguar, manioc, ouistiti (à moins que ce ne soit une onomatopée allemande sur le cri), piranha (par l'intermédiaire du portugais qui a noté par nh la nasale mouillée écrite ñ en espagnol), samba, sarigue, tamanoir, tapioca (comme le général), tatou (l'animal), topinambour (ethnonyme qui renvoie aux Tupinambas).
Notre jeune reporter
est sur la piste du fétiche de l'ananas : se pourrrait-il
que le nom du fruit
vienne en fait des Arumbayas et non des Tupinambas ?
Certains estiment que le a- initial dans ananas est dû au portugais qui aurait ajouté un article, mais en fait le mot ananá existe en tupi-guarani et le mot a été transmis ainsi en arawak – la langue du bassin des Caraïbes – lequel l'a donné ensuite à l'espagnol ancien. L'élément a- serait le nom de l'arbre en tupi, d'où le nom de l'arbre parfumé. La construction serait donc la même que celle de l'acajou qui peut être aussi le cajou ou anacardier. Le mot anana existe encore en espagnol, mais il est d'usage en botanique.
En revanche, le -s de la terminaison semble bien un ajout du portugais qui a d'abord désigné les fruits de l'arbre pris collectivement. Ce serait donc une marque de pluriel que l'on a fini par ne plus distinguer. Il faut dire qu'en portugais ce -s ne se fait pas toujours entendre. En français, la bonne prononciation voudrait que le -s soit muet, mais l'usage est bien différent. Relevons encore que le mot se rapportait d'abord à l'arbre et non un fruit – lequel n'est d'ailleurs pas à proprement parler un fruit. Puis en français le nom du fruit en est venu à désigner de nouveau la plante (fin XVIIIe s.)
L'espagnol a utilisé anana, mais à côté il a employé la métaphore piña, ou « pomme de pin », à cause de la forme du fruit. Ce terme est devenu courant, il s'est transmis à l'anglais pineapple (pomme de pin).
Dans la plupart des autres langues européennes, l'intermédiaire
semble avoir été le portugais, que ce soit en allemand Ananas,
en néerlandais ou danois ananas,
en italien ananas ou ananasso.
En français, le mot apparaît sous différentes formes
: amanat (1544), nana
(1554), ananas (1578).
L'intermédiaire est clairement tupi ou portugais. Furetière
en 1690 emploie anana parce
qu'il songe au modèle espagnol :
Le platane en question est en fait un bananier ou plantain,
à partir de l'espagnol platano. [Remarque faite par DB.]
L'ananas se rapporte aussi à une espèce de grosse fraise très parfumée, à une couleur.
Il possède un paronyme, l'anone appelée aussi corosol. Le mot (1556) est emprunté à l'arawak d'Haïti, par l'intermédiaire de l'espagnol anona (1535). Il a été d'abord écrit anon, hanon, puis par souci de différenciation orthographique anone qui peut être aussiannone (Larousse). Le mot se rapportait d'abord à la plante, il peut désigner également le fruit de celle-ci.