Les autres argots à clef
Le verlan est ce que l'on nomme un argot à clef, c'est-à-dire qu'il repose sur un système d'encodage fixe. Mais il n'est pas le seul exemple de ce type : l'anglais connaît le rhyming slang, le bambara emploie le nkosoro. Mais il existe encore d'autres argots à clef français anciens.
Figurent dans cette page : le largonji, le largonjem ou louchébem, le cadogan, le javanais.
Il a été expliqué par le pseudo-Vidocq auteur des Mémoires (1828-1829) et des Voleurs, dictionnaire d'argot (1836). Le mot largonji explique le procédé : jargon donne largon suffixé en largonji. La première lettre si elle est une consonne est remplacée par un l, l'initiale se déplace en finale et sert de point de départ à un suffixe qui part du nom de la lettre (ji pour j, bé pour b).
Soit : l + base + initiale. Le nom largonji a été employé dès 1881 par Richepin. Ce code servira à d'autres argots à clé en changeant le suffixe : -ic; -iche, -uche, -oc, -muche...
Les procédés sont donc dans l'ordre : une prosthèse, une métathèse, une paragoge. L'ensemble appartient aux figures de diction nommées métaplasmes.Voici quelques exemples de largonji :
– Lacsé : sac.
– Laféquès, café.
– Larantequé, quarante.
– Lardeuss, pardessus. La formation a dû être l'ardess-du-pa avec calembour. Suffixé en lardos, lardingue.
– Larfeuil : portefeuille, sans doute à partir de feuillard.
– Leudé, deux.
– Lidré : dix ronds (cinquante centimes).
– Linspré, prince. La formation est peu classique car elle concerne le groupe consonantique.
– Linvé : vingt sous, un franc.
– Lobé, beau.
– Lochebé, boche.
– Lorcefée, la Force (prison).
– Lorgnebé, borgne.
– Loubé, bout.
– Loucedé, en douce.
– Louf, fou. La suffixation pour loufoque, louftingue est postérieure.
– Louivé, oui, à partir de « voui ».
– Loupaque, pou. Avec un suffixe -aque.
– Loussé, sou.
b) Le largonjem et le louchébemLe largonjem a été utilisé au bagne de Brest en 1821. Il utilise l'encodage du largonji mais avec un seul suffixe invariable : -em. Ainsi bon devient lonbem, boucher louchébem.
Le mot louchébem a été le plus connu car il a été employé par les bouchers de La Villette. Il remonterait à 1850.Quelques exemples de louchébem attesté :
– Labatem, tabac.
– Laquépem, laq'çonpem, paquet.
– Larantequem, quarante.
– Larq'bem, quart.
– Latrequem, quatre.
– Lerchem, cher.
– Linguem, couteau.
– Lonjourbème, bonjour.
– Louivème, oui.
– Loussem, sous.
– Luctrème, truc.Comme on le voit, cet argot est plus pauvre que le largonji.
Il est attesté en 1896. Sa formation consiste à infixer les éléments -dg- après chaque voyelle et à redoubler cette voyelle. Par exemple : cadgadodgogandgan.
Il insère l'élément -av-, -va- ou -aj- après chaque consonne. Ainsi langage devient lavangavajave. Le javanais a été utilisé dès 1857, il est surtout connu par la tradition scolaire. Quelques exemples lexicalisés :
– Gravosse, grosse.
– Baveau, beau.
– Chagatte, chatte.Lire les pages sur le verlan
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